Job Coach > Trop chaud pour aller travailler ? Ce que dit le droit suisse en cas de forte chaleur

Trop chaud pour aller travailler ? Ce que dit le droit suisse en cas de forte chaleur

Le travail en période de forte chaleur rend les journées pénibles et peut même être dangereux pour la santé. Certain·e·s salarié·e·s sont par ailleurs plus exposé·e·s à ce risque, notamment celleux qui travaillent à l’extérieur ou dans un environnement déjà marqué de base par des températures élevées (blanchisseries, cuisines, etc.). Mais alors est-ce possible de ne pas aller travailler en cas de forte chaleur ou de canicule ? Que dit le droit suisse à ce sujet ? Que pouvez-vous mettre en place pour vous protéger des risques thermiques ? Décryptage.

 

Forte chaleur et canicule au travail : que dit le droit suisse ?

 

Avec la multiplication des vagues de chaleur et l’augmentation du nombre d’accidents du travail qui y sont liés (selon la Suva, ils augmentent de 7 % les jours où il fait plus de 30 °C), il paraît légitime de se demander si le droit suisse prévoit un congé chaleur ou un quelconque droit de retrait. La Loi fédérale sur le travail (LTr) ne prévoit aucun seuil de température à partir duquel un·e employé·e peut ne pas se rendre au travail, hormis pour les femmes enceintes. En effet, ces dernières ont le droit de ne pas aller travailler si la température à leur poste excède les 28 °C (et de continuer à toucher au moins 80 % de leur salaire), selon l’Ordonnance fédérale sur la protection de la Maternité (OProMa).

 

Zoom sur l’actualité : y a-t-il déjà eu des exceptions ?

 

Certaines dispositions ont déjà été prises dans le passé lors de pics de chaleurs importants, comme ce fut le cas en 2023. En effet, cette année-là, la Suisse a connu son troisième été météorologique le plus chaud depuis 1864. Le 21 août, l’Office genevois de l’inspection du travail avait alors pris la décision d’interdire les chantiers les plus pénibles l’après-midi. Une première dans le canton ! La directive a été adoptée en juin de la même année et prévoit des mesures contraignantes en cas de pics de chaleurs. Un congé chaleur avait également été instauré en 2022 dans les écoles du canton de Bâle-Ville lors de la vague de chaleur du mois de juin.

 

Quels sont les dangers du travail en période de forte chaleur ?

 

On peut parler de canicule lorsque les températures restent élevées le jour et la nuit, pendant au moins trois jours d’affilée (généralement au-dessus de 30 °C la journée et 20 °C la nuit). La température de l’air n’est pas ailleurs pas suffisante pour déceler une situation de chaleur à risque, car l’humidité, les déplacements d’air ou encore l’ensoleillement direct peuvent influencer la température ressentie de manière significative. Le travail peut donc être déjà difficile lorsqu’il fait 26 °C, ou même moins !

 

Dans certaines circonstances, la chaleur peut être davantage problématique, c’est notamment le cas des travaux physiques pénibles, des métiers qui nécessitent le port de vêtements qui entravent la dissipation de la chaleur, lorsque les locaux sont mal ventilés ou lorsque la personne a une santé fragile. Fatigue, baisse de l’attention, vertiges, crampes, déshydratation, coup de chaleur, troubles de la vision, etc. : les risques liés à des conditions de chaleur élevée peuvent être dangereux, voire mortels. Les salarié·e·s de la construction routière sont par ailleurs particulièrement touchés par les accidents dus à la chaleur (qui engendre une mauvaise concentration, de la fatigue supplémentaire, etc.), car leur lieu de travail peut devenir une fournaise lorsque l’asphalte surchauffe et qu’il augmente la chaleur ambiante.

 

Comment les entreprises doivent-elles protéger leurs salarié·e·s de la chaleur ?

 

Bien que le droit suisse ne prévoit pas de seuil de température à partir duquel un·e salarié·e peut arrêter de travailler, les employeur·se·s sont tout de même dans l’obligation de protéger la santé des travailleur·se·s (selon l’art. 328 du Code des obligations et l’art. 6 de la loi fédérale sur le travail). Ces dernier·ère·s doivent par ailleurs être protégé·e·s contre tout ensoleillement excessif (selon l’art. 20 OLT 3) et les locaux doivent disposer d’un volume d’air suffisant, ainsi que d’une température adaptée à la nature du travail afin de ne pas porter préjudice à la santé des collaborateur·rice·s (selon l’art. 16 OLT 3).

 

Le Secrétariat d’État à l’économie a par ailleurs mis en place des notices destinées aux employeur·se·s, qui regroupent plusieurs mesures classifiables en deux catégories.

 

Les mesures techniques

 

Les mesures techniques regroupent les solutions permettant de limiter les effets de la chaleur, telles que la réduction des sources de chaleur, les machines limitant les efforts physiques, les stores extérieurs, les avant-toits ou encore les ventilateurs.

 

Les mesures organisationnelles

 

Les mesures organisationnelles comprennent tout ce qui est lié à l’aménagement du travail : la répartition des pauses, la désignation d’un·e responsable canicule, l’adaptation de l’activité professionnelle, le décalage des tâches ardues, le télétravail, la suppression du port de la cravate, l’accès à des boissons désaltérantes, etc.

 

Dans le cas où la prévention des maladies liées à une forte chaleur est impossible malgré ces mesures, la Suva peut exiger la mise en place d’examens préventifs de médecine du travail (selon l’art. 70 OPA) afin d’exclure un·e employé·e d’un travail jugé dangereux pour ellui.

 

Bon à savoir : le département de l’Économie et de l’Emploi (DEE) a récemment dévoilé une application (MeteoAtWork) qui permet d’évaluer les contraintes thermiques et de savoir quelles sont les mesures préconisées (selon le type de travail notamment) à mettre en œuvre : une première en Suisse !

 

Mesures personnelles : comment survivre aux journées chaudes au travail ?

 

Les employé·e·s doivent également respecter des mesures personnelles afin de se protéger de la chaleur, que ce soit à l’extérieur ou dans des locaux :

 

  • le port de vêtements légers et lâches pour laisser la sueur s’évaporer ;
  • le port de lunettes de soleil et d’un couvre-chef ;
  • l’application d’une crème solaire plusieurs fois dans la journée ;
  • la consommation d’eau fraîche de manière régulière et suffisante ;
  • l’instauration de pauses dans un endroit frais ou ombragé ;
  • la prise de repas froids et légers ;
  • la prise en considération de potentiels facteurs personnels aggravants (prise de médicaments, âge, etc.) ;
  • la connaissance des symptômes du coup de chaleur et des premiers gestes de secours qui doivent être appliqués.

 

Repérer les signes du coup de chaleur

 

Le coup de chaleur ou hyperthermie survient lorsque le corps a du mal à réguler sa température et que celle-ci augmente donc de manière dangereuse. Cette urgence vitale peut être précédée de signes avant-coureurs qui doivent vous alerter (soif importante, étourdissements, nausées, maux de tête, respiration rapide, etc.), mais lorsque le coup de chaleur est déjà survenu, des symptômes davantage inquiétants sont présents :

 

  • température (très) élevée du corps ;
  • absence de transpiration ;
  • peau très rouge et très chaude ;
  • confusion, agressivité ou/et désorientation ;
  • convulsions ou coma dans les cas graves.

 

Comment agir ?

 

Si l’un·e de vos collègues est victime d’un coup de chaleur, il est impératif d’agir vite ! Commencez par appeler les secours et refroidissez le corps de la personne en la transportant dans un endroit frais et en utilisant diverses techniques (brumisateur, ventilateur, serviette mouillée, etc.). Pensez également à prévenir votre employeur·se.

 

Une forte chaleur ne vous permettra donc normalement pas de ne pas travailler (sauf exceptions), mais votre employeur·se doit mettre en place plusieurs mesures destinées à assurer votre sécurité et à préserver votre santé au travail (les mesures techniques et organisationnelles). Pour ce faire, iel doit d’abord évaluer la contrainte thermique, ce qui est désormais facilité grâce à l’application MeteoAtWork. Iel doit également prendre en compte les besoins de chacun·e des collaborateur·rice·s dans la mesure du possible (âge, maladie, etc.) afin d’assurer leur bien-être. Et bien sûr, n’oubliez pas de vous protéger en buvant suffisamment d’eau et en vous mettant dans un endroit frais dès que possible !

 

Pour aller plus loin : avec la multiplication des vagues de chaleur, ainsi que la prise de conscience du changement climatique, de nouvelles règles pourraient être mises en place (et les conventions collectives de travail modifiées) à l’avenir afin de répondre aux besoins et aux enjeux des différents secteurs.

 

L’image ci-dessus a été créée par notre designer à l’aide d’un outil d’IA. 🧑‍🎨 🤖

Articles similaires

Quels sont les délais de résiliation en vigueur en Suisse?
Horaires flexibles : à quoi faut-il faire attention ?